La mort de Shoya Tomizawa au Grand Prix de San Marin a particulièrement ébranlé Thomas Lüthi pour qui le Japonais était un ami.
L’ombre de Tomizawa plane toujours sur le paddock. Aegerter et Lüthi porteront désormais un petit numéro 48 sur leur carénage, celui de l’infortuné pilote japonais.
Jean-Claude Schertenleib - le 16 septembre 2010, 22h42
Le Matin
GP D’ARAGON
La scène s’est déroulée jeudi, il y a une semaine. Teruyuki et Yukiko Tomizawa, les parents de Shoya, avaient tenu à se rendre sur le circuit de Misano, sur la Riviera de Rimini. Ils ont voulu voir l’endroit où, le dimanche précédent, leur fils avait perdu la vie dans un terrible accident, pendant la course Moto2. Fred Corminboeuf, le manager du team Technomag-CIP, raconte: «Nous sommes allés dans le virage où le drame s’est produit. Le papa de Shoya a bien regardé, puis il s’est tourné vers nous: «Trouvez-moi un plus bel endroit pour mourir, pour un passionné comme l’était Shoya. Un virage à fond, à 250 km/h!» Puis, sans nous retourner, nous avons quitté les lieux.»
Les bienfaits de la nature
Le lendemain, Mme et M. Tomizawa rejoignaient le Japon, emmenant avec eux la dépouille de leur fils. Les obsèques se sont déroulées mardi soir et mercredi, à Chiba, dans la grande banlieue de Tokyo.
«Shoya est mort en faisant ce qu’il aimait le plus»: on dit souvent ce genre de banalités, dans la douleur. Mais après la mort, il y a la vie. Et après le drame, il y a une nouvelle course pour ceux qui étaient amis avant d’être adversaires: «Les premiers jours ont été terribles, confie Thomas Lüthi, qui avait en Shoya Tomizawa l’un de ses rares copains dans le paddock. Mon podium, mon anniversaire le lendemain de la course, tout cela ne comptait plus, n’avait plus la moindre importance.» Tom s’est appuyé sur ses proches, «pour parler, beaucoup parler.» Pour faire sortir la rage, qui était en lui: «Je me suis promené dans la nature, pour réfléchir.» Et en arrivant dans le paddock du tout nouveau circuit d’Aragon - les accès sont encore en chantier, on attend d’ores et déjà un immense chaos dimanche - Tom a collé un petit numéro 48 sur le carénage de sa Moriwaki, clin d’œil au cher disparu. «La peur? Non, je n’ai pas peur. Mais j’ai toujours autant de respect pour notre travail, pour mes adversaires», ajoute Lüthi.
Domi et la rose rouge
Equipier de Tomizawa, Dominique Aegerter a lui aussi passé par des moments difficiles. Désormais, il fait front, dans un environnement direct qui ne peut qu’être particulier: une rose rouge offerte par des fans, la réplique en miniature de la moto de Shoya, parce que dans l’équipe, il était «petit Shoya» pour tous, se trouvent dans le stand que le Suisse occupe désormais tout seul. Ce week-end en Aragon, mais plus encore dans deux semaines au Japon, où toute la famille du défunt viendra au circuit pour apporter à l’équipe des énergies positives, Domi n’aura pas la partie facile. Ce qui ne l’empêche pas, comme beaucoup d’autres, de vouloir le plus vite possible offrir un somptueux cadeau au copain parti. Parce que la course, c’est ce qu’il aimait le plus, Shoya.
UN TROPHÉE SHOYA TOMIZAWA
C’est Toni Elias, le leader du mondial Moto2, qui l’a annoncé officiellement hier soir: «Pour succéder au Trophée Michel Métraux - le regretté fondateur et président de l’IRTA, l’Association des teams de GP - qui récompensait chaque année le meilleur privé en 125 et en 250 cm3, j’ai l’honneur de vous faire savoir qu’un Trophée Shoya Tomizawa sera remis, en fin de saison, au pilote le plus méritant de notre catégorie, une récompense que Shoya aurait mille fois mérité cette année.» Ce seront les pilotes eux-mêmes qui voteront.